Jun 20, 2005

56 ans et ça dure, le moyen orient

Suit un article que j'ai écrit pour Les Chroniques Du l'année dernière,
Je le met içi pour l'intérêt général qu'il porte (et apporte).


56 ans et ça dure, le moyen orient



J’ai toujours baigné dans ce conflit, depuis tout petit on m’apprenait, et je voyais autour de moi, ce conflit et ses résultats sur ma vie, mon entourage et ma façon de voir les choses. Depuis que je suis en France, je suis sorti du formatage de « chez moi », j’ai décidé de laisser tomber mes idées reçues et de tenter de penser autrement, de faire mon autocritique et de prendre l’opinion de l’autre pour ce qu’elle est et non pour l’opinion d’un ennemi. Cinq ans que je suis en France, ma vision du conflit a t elle changé? Certainement !
Aujourd’hui en regardant les infos je m’en suis rendu compte : en un jour comme aujourd’hui, il y a 56 ans l’état d’Israël fut créé et de là toute l’histoire de la région découle.

Un peu d’histoire, pour le plaisir.
Il y en a qui préfèrent commencer l’histoire quelques millénaires avant Jésus Christ moi je la situe beaucoup plus tard. Le conflit du moyen orient a vu le jour il y a maintenant une centaine d’année avec la première guerre mondiale. L’empire ottoman, qui contrôlait la région à l’époque, s’allie à l’Allemagne et à l’Autriche-Hongrie. En 1917, Lord Balfour prononce sa célèbre déclaration dans laquelle il promet la terre de Palestine (la Palestine historique qui s’étend du Jourdain à la méditerranée) pour y établir un foyer juif. Et là le premier problème surgit (problème qui m’emmène à écrire ceci aujourd’hui), la terre de Palestine est déjà habitée par un peuple, qu’on va appeler le peuple arabe de Palestine et qui deviendront par la suite les Palestiniens. 1918, la guerre s’achève sur une victoire de l’Entente, la Palestine est placée sous administration puis sous mandat britannique. Les vagues d’immigration de juifs vers la Palestine commencent, avec de temps à autre des limitations par le mandataire britannique pour calmer la colère des habitants arabes de la région. Tout au long de cette période des émeutes des deux cotés se poursuivent, des émeutes et des génocides qui mettent en place le conflit. Avec la fin de la deuxième guerre mondiale, le sionisme se fixe comme but la création d’un état. A la fin de la guerre, les violences continuent en Palestine avec d’un coté des rafles et des pogroms antisioniste et de l’autre des attentats contre les intérêts britanniques commis par des organisations juives. Face au blocage, les Britanniques décident de se remettre à l’ONU qui décide d’un plan de partage en 1947. Ce plan de partage est refusé par la ligue arabe. S’en suivra une vague de violence (le massacre de Deir Yassine, le massacre de Kfar Etzion. Les villes palestiniennes tomberont l’une à la suite de l’autre et l’exode des palestiniens vers les pays voisins commence. Le 14 mai 1948 le mandat britannique s’achève. Les Britanniques se retirent laissant la région sur le bord d’un chaos qui, depuis, continue à embraser la région pour en faire une des plus instables du monde. Le même jour, l’état d’Israël est proclamé. C’est la « nakba » (la catastrophe en arabe). Le 15 mai 1948 les pays arabes attaquent l’état naissant. Et la suite ? D’autres guerres s’en suivront, beaucoup de personnes en périront, des alliances stratégiques et même des traités de paix seront signés. Moi j’arrête mon cours d’histoire avec la guerre de 1948. J’ai posé les bases de ce conflit. Tout ce que j’ai raconté et tout le reste, vous pourrez le trouver en faisant quelques petites recherches. Pourquoi est ce que j’ai raconté cette histoire ? Parce que je me suis rendu compte que peu (très peu) de gens connaissent l’origine du problème. Depuis les accords d’Oslo, il y a eu comme un black-out sur cette période dans les médias. L’histoire est la base de tout conflit et ce n’est qu’en regardant ses origines qu’on pourra un jour tenter de le résoudre.

Qu’est ce qui bloque actuellement ?
Après l’histoire, parlons un peu de l’état actuel des choses. Le gouvernement israélien est en train de construire un mur de séparation, mur de sécurité, mur de l’apartheid, appelez le comme vous voudrez. Il assassine les dirigeants du Hamas en croyant que ceci réduira le nombre d’attentats en Israël. Il refuse toute négociation avec un partenaire qu’il considère comme non crédible mais propose un retrait unilatéral de Gaza et une multiplication des colonies en Cisjordanie. M. Le président des Etats Unis George Bush approuve le plan Sharon et demande aux palestiniens de regarder la « vérité » en face, d’être réaliste et d’accepter le fait accompli, Bush prend ainsi position s’alignant sur les positions de Sharon, cette position va à l’encontre de la vision qu’à l’ONU de la solution (mais serait ce la première fois ?). En effet l’ONU considère la présence de colonies sur les territoires palestiniens illégale. Mais encore ça ne serait pas la première résolution de l’ONU non respectée (en toute impunité, vous en conviendrez) par Israël. Sharon s’est même permis dernièrement de laisser entendre qu’une expulsion de Arafat (président élu de l’autorité palestinienne) voire une atteinte à son intégrité physique n’est pas à exclure.
Trois questions essentielles bloquent toute sorte de négociation depuis Taba et Camp David, la question de Jérusalem, les colonies israéliennes en territoires palestiniens et le destin des réfugiés palestiniens dans les quatre coins de la terre.

Jérusalem
Jérusalem, ville revendiquée par les Israéliens pour capitale, et par les Palestiniens aussi. Actuellement, Jérusalem est entièrement annexée par Israël. Les quartiers arabes ainsi que les villes de la banlieue de Jérusalem sont du coté israélien du Mur. Une ville qui pour le gouvernement israélien et pour les faucons de la politique israélienne ne peut être divisible. Le grand Jérusalem doit être capitale éternelle d’Israël. Une ville réclamée en totalité aussi par une grande fraction des palestiniens.

Les colonies
A l’heure où en Inde on avait procédé à une décolonisation pacifique, à l’heure où l’Algérie combattait pour obtenir son indépendance. A l’heure où la décolonisation est la cause à la mode, dans les territoires l’inverse se produisait. Les nouvelles colonies et les nouvelles villes se faisaient construire sur les ruines des anciennes villes palestiniennes. Aujourd’hui, les colonies continuent à s’étendre pour changer toutes les données démographiques de la région. Ces données vont peser sur toute future négociation sur le statut final des territoires. Et là est une politique délibérée pour modeler la région. Un article apparu dernièrement dans Ha’aretz (le journal de centre gauche israélienne) explique comment les colons ont réussi à créer un état à l’intérieur de l’état. Les colons parviennent à imposer leurs visions politiques. Le résultat du dernier referendum du Likoud en est la preuve. Ces résultats montrent le poids qu’ont les colons dans le spectre politique israélien et ceci n’est pas prêt de changer.

Les réfugiés palestiniens
Et là est pour moi le problème le plus important et le plus urgent à résoudre. On parlait de donner à un peuple sans terre, une terre sans peuple. Mais ce n’était qu’un leurre. Dans la terre habitait un peuple, et ce peuple était les Palestiniens, et les Palestiniens ont été virés par divers moyens de leurs maisons pour que l’état d’Israël puisse être fondé. Il y a actuellement 7 millions de Palestiniens. 4 millions de ceux là vivent dispersés tout autour de la planète. La fuite (et l’expulsion) des palestiniens du territoire de la Palestine historique s’est faite sur deux vagues essentielles. La première en 1948 avec la création de l’état d’Israël, la deuxième en 1967 avec la guerre des six jours à la suite de laquelle Israël occupait la Cisjordanie le Sinaï et le Golan. Certains de ces palestiniens vivent dans des camps de réfugiés dans les pays arabes du voisinage. Ces camps de réfugiés sont le visage même de la misère. Les pays arabes hôtes ne font aucun effort pour améliorer la condition de vie des réfugiés palestiniens. Les réfugiés palestiniens au Liban vivent dans des conditions des plus pitoyables, ils n’ont pas le droit de propriété, plus de 70 professions leurs sont interdites, tous cela sous prétexte d’éviter l’installation des réfugiés palestiniens dans les pays arabes et pour préserver l’identité palestinienne. Il est important de souligner un petit paradoxe de la situation. N’importe quel juif peut aller en Israël et avoir la nationalité alors que les réfugiés palestiniens, même ceux nés là bas, ne peuvent espérer un droit de retour. Une injustice a été commise à l’égard de ces personnes, et il faut absolument la résoudre le plus vite possible. La solution passera, comme le stipule la résolution 194 des Nations Unies, soit par des compensations pour ces 56 ans passés en exil (chose que la plus part des palestiniens refuseront catégoriquement) soit par un droit de retour accordé à tous les réfugiés (chose que les Israéliens refuseront pour des raisons démographiques évidentes). En attendant, la question des réfugiés reste en suspens, les Palestiniens en exil vivent dans l’espoir de retrouver leurs villes et villages. Beaucoup gardent des souvenirs de leurs maisons (qui ont sûrement disparues depuis), une clef ou un acte de propriété. Le problème n’est donc pas, comme beaucoup de gens essayent de nous le faire croire, un problème de religion. Le problème est celui d’un peuple qu’on a viré de chez lui pour qu’un autre s’installe à sa place. Le problème est celui de 4 millions de personnes qui ne rêvent que de revenir vivre en Palestine, comme les juifs avant rêvaient de revenir à Jérusalem.

Le quotidien des palestiniens
La vie quotidienne des palestiniens devient de plus en plus dur. Tous les jours des maisons sont détruites. Pendant la première moitié du mois de mai 2200 personnes ont vu leurs maisons détruites par des bulldozers israéliens. Des champs d’oliviers centenaires sont arrachés pour la construction du mur ou pour la construction de nouvelles colonies. Certains agriculteurs palestiniens se voient interdire l’accès à leurs champs. Et quand l’agriculteur parvient à récolter ces oliviers, il ne peut jamais écouler sa récolte à cause du blocage des territoires. Le mur construit par le gouvernement israélien va séparer beaucoup d’agriculteurs de leurs terres. Le mur va transformer le territoire palestinien en une multitude d’enclaves séparées. La liberté de mouvement sur le territoire sera considérablement réduite. Le blocage des villes continue et le siège dure. La politique d’assassinat politique (condamné par la communauté internationale) continue à sévir contre les chefs des partis politiques palestiniens. L’occupation persiste et n’est pas prête de finir.

Et en France
Il est inconcevable d’importer le conflit en France. Tout acte d’agression en solidarité avec les Palestiniens est condamnable (comme tout acte d’agression tout court). Il faut cependant apprendre ce qui s’y passe, pour en discuter et aider ceux qui en ont besoin. Et pour discuter, il faut écarter la violence, il faut tout autant écarter les accusations d’antisémitisme pour un oui ou pour un non. Quand une personne critique la politique du gouvernement de Sharon ou de tout gouvernement israélien, ce n’est pas du racisme et la personne qui critique ne veut pas en finir avec tous les juifs et les balancer à la mer. Quand quelqu’un pointe la réalité des choses c’est pour montrer qu’il y a injustice. Le fait d’accuser d’antisémitisme à tort et à travers un groupe de rap qui prône le retour à la raison des deux partis pour une paix juste et durable aura un effet dévastateur. Ceci va banaliser l’antisémitisme et rendre l’accusation facile à porter. Et banaliser n’importe quelle sorte de racisme n’est qu’un fait destructeur pour la société. L’antisémitisme va perdre sa signification haineuse et horrible à cause de ces dérives. Il faut donc arrêter de tous mettre dans le même panier (comme pour tout dans la vie) et faire le tri entre le vrai antisémitisme totalement condamnable et absolument con, et les remarques sur une politique, des fois fausses, mais qui n’ont absolument rien à voir avec la haine raciale.

Voilà…
Je pense qu’aucun des deux partis ne pourra en finir avec l’autre par les moyens militaires. La seule solution passe par la réconciliation et par la paix. Et la paix ne peut avoir lieu si l’occupation continue. Tant que les sévisses infligées par les Israéliens aux palestiniens continueront le problème ne pourra être résolu. Les deux peuples doivent se diviser cette portion de terre tant bien que mal et en finir avec ce conflit qui dure depuis maintenant très longtemps. Les morts des deux cotés pèsent sur la conscience de l’humanité. Je n’ai pas été objectif, je l’avoue. Je n’ai pas dit toute la vérité, mais qui détient la connaissance absolue? Je vous ai exposé la situation telle que je la vois et j’ai dit ce que j’avais à dire. Je ne vous demande que de savoir ! De savoir et de voir les faits dans leur contexte général. Et c’est là uniquement que vous pourrez porter un jugement sur la situation. Apprenez ce qui s’y passe, apprenez ce qui s’y est passé et seulement après faites vous votre propre idée.

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